Nathanaëlle VERCRUYSSE, Directrice gestion des sinistres pour compte de Sedgwick, et Fabrice COLLET, Expert fort enjeu Directeur Hub Provence Entreprises de Sedgwick sont revenus sur les particularités de la tempête Alex, arrivée le 30 septembre sur les côtes de la Bretagne sud, qui a touché avec fracas le département des Alpes-Maritimes le 2 octobre. Les orages associés au front ont déversé de très grandes quantités de pluies dans l’arrière-pays. Les vallées de la Tinée, et surtout de la Vésubie et de la Roya ont été extrêmement touchées, avec un bilan très lourd, 9 morts et autant de disparus à la date de rédaction de cet article. Les dégâts sont impressionnants : une centaine de maisons endommagées voire complètement détruites, des ponts et des routes emportés, laissant les villages inaccessibles par des moyens terrestres.
Nathanaëlle Vercruysse:
Cet évènement s’est produit en plein week-end, et immédiatement le Comité de Direction de Sedgwick a déclenché une cellule de crise. Dans ces cas-là, nos collègues s’organisent selon un process bien déterminé. En tant qu’experts, se mobiliser dans ces circonstances comme celles-là fait partie de notre métier. Face à un évènement d’une telle intensité, nous avons tout de suite identifié que nous aurions des besoins spécifiques en matériel, notamment en hélicoptères. C’est Fabrice qui s’en est chargé, il a été le coordinateur pour la tempête Alex, qui a nécessité des moyens humains, psychologiques et matériels hors normes.
Fabrice Collet:
Nous avons rencontré trois difficultés majeures dans la gestion de cette catastrophe naturelle. La première demeure l’intensité de l’évènement couplée à l’accessibilité restreinte de ces vallées. Les routes ont été coupées et l’accès était impossible. Nous avons tous vu des inondations, qui entraînent des infiltrations en toiture ou des rez-de-chaussée de maisons ou de commerces envahis par l’eau. Dans le cas de la tempête Alex, nous avons tout de suite compris qu’il n’y aurait pas de petits dossiers, mais une grande majorité de dossiers à fort enjeux, avec des indemnités comprises entre 500.000 euros et plusieurs dizaines de millions d’euros. Là s’est située la deuxième difficulté : faire intervenir dès le départ un nombre suffisant d’experts capables de répondre en un temps record à ce type de dossiers. Nous avons mis en place une équipe d’experts suffisamment aguerris pour dire en un coup d’œil, en une journée, comment aborder ces dossiers financièrement engageants. Enfin, la troisième difficulté provient des réponses que nous attendons aujourd’hui de l’Etat, et notamment du fonds Barnier, pour savoir comment certains sinistres vont être traités. Sur ces communes sinistrées, un classement va être fait en zone noire, où il sera interdit de reconstruire, zone rouge, où il sera possible de le faire sous certaines conditions, et zone verte, sous d’autres conditions encore. Le fond Barnier vient prendre en charge les administrés selon des modalités définies pour chaque catastrophe naturelle, et qui ne sont pas encore connues aujourd’hui en ce qui concerne la tempête Alex. Une commission se réunit pour décider du pourcentage de la valeur pris en charge par ce fond d’Etat, en cas de classement en zone noire (100%, 80%, 50%...).
Concrètement, si un bien immobilier se situe dans un périmètre où il est interdit de reconstruire, il existe deux cas de figure :
- L’administré n’est pas assuré : il fait directement une demande au fond Barnier et attend son indemnisation,
- Il est assuré. L’expert définit la valeur vénale du bien, déduction faite du terrain. Le propriétaire est indemnisé via son assureur, puis il procède à une déclaration au fond Barnier pour la partie terrain.
Aujourd’hui, nous connaissons ce processus global mais nous n’avons pas les modalités d’intervention du fond d’Etat. Pour les dossiers que Sedgwick a eu à connaître, les acomptes ont été versés, sauf pour les biens immobiliers situés dans les futures zones noires, où les indemnités seront compliquées à calculer.
Nathanaëlle Vercruysse:
Bien que nous soyons des professionnels aguerris, il s’est passé quelque chose de particulier dans la gestion de la tempête Alex. Nous avons mis en œuvre des moyens colossaux pour être sur place le plus vite, ce qui était complexe mais possible pour un réseau structuré comme le nôtre, fort d’un nombre suffisant de femmes et d’hommes capables de se mobiliser, dans des conditions d’intervention proprement hallucinantes. Ces experts prennent des risques pour aller sur le terrain lors de phénomènes extrêmes comme celui-là. Pour tous ceux qui sont allés au contact des habitants de ces vallées, les valeurs de solidarité et d’humanité ont été centrales. Sedgwick a d’ailleurs décidé de faire un don aux sapeurs-pompiers qui ont payé un lourd tribut dans cette tempête, et nos collaborateurs ont été appelés à en faire de même.
Fabrice Collet:
Certains assurés ne pouvaient se rendre sur place. Nous avons essayé d’être leurs yeux pour leur donner des nouvelles de leur maison, pouvoir leur confirmer si elle était toujours là. Il y a eu dans cette catastrophe naturelle une chaîne de solidarité entre les courtiers, les agents, les compagnies et les experts. Chacun a fait ce qu’il y avait à faire, du mieux possible.
Nathanaëlle Vercruysse:
Dans ces cas extrêmes, les courtiers doivent savoir qu’ils peuvent compter sur nous, s’ils ont besoin d’une intervention spécifique pour leur client, il ne faut pas qu’ils hésitent à nous contacter. Nous sommes là pour cela. Et nous le resterons dans la durée, désormais c’est de la réactivité sur le paiement des indemnités qui est attendue par les assurés.
Propos recueillis par Céline MESLIER
Cet article a été initialement publié dans Planète CSCA.